MAIS MOI JE VOUS DIS, AIMEZ VOS ENNEMIS⊠»Matthieu ; Romains StĂ©phane Lauzet1 Introduction Ce verset appartient Ă un ensemble plus long quâon appelle communĂ©ment le Sermon sur la montagne » et qui occupe les chapitres 5, 6 et 7 de lâĂ©vangile de Matthieu. Ces trois chapitres sont souvent prĂ©sentĂ©s comme un abrĂ©gĂ© de la vie chrĂ©tienne, le programme, la feuille de route de celles et ceux qui veulent suivre JĂ©sus2, de celles et ceux qui sont, selon ses paroles mĂȘmes, le sel de la terre et la lumiĂšre du monde »3. Dans ces chapitres, JĂ©sus invite ses disciples Ă changer de paramĂštres et Ă avoir un comportement diffĂ©rent, moralement supĂ©rieur Ă celui des religieux de son temps et qui tranche avec ce qui semble couramment admis4. Câest en maniant les paradoxes et en usant de six antithĂšses vous avez appris quâil a Ă©tĂ© dit mais moi je vous dis »5 quâil dispense son enseignement les formules font mouche et claquent comme des slogans. Reconnaissons, pour commencer, que la phrase a de quoi nous surprendre et quâelle nous paraĂźt complĂštement irrĂ©aliste, impraticable, utopiste6. Comment en effet aimer celui qui nous fait souffrir ? Comment aimer notre ennemi ? Notre rĂ©action premiĂšre nâest-elle pas plutĂŽt de le fuir ou alors de le combattre, de rendre coup pour coup et de tenter de le mettre hors dâĂ©tat de nuire ? Admettons aussi que ce prĂ©cepte peut donner raison Ă ceux qui pensent que lâĂvangile est une douce rĂȘverie et une aimable histoire pour les enfants, les naĂŻfs et â certains nâhĂ©siteront pas Ă le dire â pour les mauviettes. Freud7, lâinventeur de la psychanalyse, a dĂ©noncĂ© lâabsurditĂ© du commandement dâamour du prochain et le philosophe Nietzsche8, de son cĂŽtĂ©, a vu dans lâamour des ennemis la preuve que le christianisme Ă©tait une religion pour les faibles et les poltrons. Oui, ce texte est dĂ©rangeant, choquant mĂȘme. Raison de plus pour aller un peu plus loin et se demander pourquoi le commandement dâaimer son ennemi nous met si mal Ă lâaise. Pour ma part, je vois au moins trois raisons qui peuvent expliquer notre trouble. Et Paul, dans le passage de lâĂ©pĂźtre aux Romains Rm nous permet dây voir un peu plus clair. La premiĂšre raison, câest que nous nous pensons plus sages que Dieu9. Nous avons la fĂącheuse tendance Ă vouloir nous mettre Ă sa place, nous attribuant ses prĂ©rogatives. Nous avons du mal Ă penser que câest Ă Dieu et non Ă nous, en tant quâindividus, de rĂ©gler ses comptes »10. La deuxiĂšme raison, câest que nous oublions â ou peut-ĂȘtre que nous ne lâavons jamais su ? â quâil nous est demandĂ© de rechercher ce qui est bien devant tous les hommes »11, de ne pas nous laisser vaincre par le mal, mais de vaincre le mal par le bien »12. Et enfin la troisiĂšme raison, câest que nous avons peur peur de la souffrance, peur dâĂȘtre pris pour des naĂŻfs et des lĂąches, peur du prix Ă payer. Une fois de plus nous sommes confrontĂ©s au dilemme de lâobĂ©issance. Et pourtant, comme le disait le pasteur afro-amĂ©ricain Martin Luther King, qui sâest Ă©levĂ© contre la sĂ©grĂ©gation raciale dans son pays et qui en est mort Nous devons aimer nos ennemis, car ce nâest quâen les aimant que nous connaĂźtrons Dieu et que nous ferons lâexpĂ©rience de sa saintetĂ©. Bien sĂ»r, cela peut paraĂźtre abstrait. La vie est affaire dâacquisition, quitte Ă rendre coup pour coup, elle est affaire de loups qui sâentre-dĂ©vorent [âŠ] Mes amis, nous avons suivi trop longtemps la voie soit disant pratique, et cela ne nous a conduits inexorablement quâĂ un dĂ©sordre plus profond et au chaos. Le temps est encombrĂ© des ruines de communautĂ©s qui se sont abandonnĂ©es Ă la haine et Ă la violence. Pour le salut de notre nation et de lâhumanitĂ©, nous devons suivre une autre voie [âŠ] Nous nâabandonnerons pas [âŠ] notre privilĂšge et notre obligation dâaimer13. Oui, en vĂ©ritĂ©, ces paroles de JĂ©sus sont justes. Nous sommes en prĂ©sence dâun texte rĂ©volutionnaire, non dĂ©nuĂ© de rĂ©alisme et donc parfaitement applicable. Dâautres lâont fait avant nous, dâautres le vivent aujourdâhui. Notre problĂšme nâest pas alors tant de comprendre ce que JĂ©sus dit que de le mettre en pratique !14 Le sens du texte Je viens de dire Ă lâinstant que notre problĂšme Ă©tait plus de lâordre de lâobĂ©issance que de la comprĂ©hension. Il nâempĂȘche, il est primordial de bien comprendre ce quâa dit JĂ©sus pour nous Ă©viter faux-sens ou contresens et nous fourvoyer dans des impasses ou de mauvaises directions. Soyons clairs ce texte ne peut en aucun cas justifier le laisser-aller et lâanarchie. JĂ©sus ne sâoppose pas Ă la loi, il ne dit pas que la justice ne doit pas ĂȘtre rendue. Il ne prĂ©conise pas le laxisme et nâinvite pas Ă la passivitĂ©. Notons-le, il vise le comportement individuel du croyant et le Nouveau Testament rappelle plus loin le rĂŽle important des autoritĂ©s pour lesquelles nous sommes invitĂ©s Ă prier afin que nous puissions mener, Ă lâabri de toutes violences et dans la paix, une vie qui exprime dans tous ses aspects, notre attachement Ă Dieu »15. JĂ©sus ne dit pas non plus que nous ne devons pas avoir dâennemis â il en a eu lui-mĂȘme et quand il envoie ses disciples en mission, il leur rappelle quâils sont comme des brebis au milieu des loups »16. Le tableau est plutĂŽt sombre puisquâil nous prĂ©vient que lâopposition pourra provenir des autoritĂ©s et mĂȘme des membres de notre propre famille. Comme me le disait un frĂšre dâun pays oĂč la foi chrĂ©tienne est non seulement interdite mais aussi combattue ça fait partie du package ! » JĂ©sus invite Ă prendre du recul par rapport au discours ambiant, dâautant plus que ce discours a tordu le sens mĂȘme de lâĂcriture. Les croyants se sont servis de la loi du talion, le fameux Ćil pour Ćil, dent pour dent », censĂ©e ĂȘtre appliquĂ©e par les tribunaux, pour rĂ©gler leurs comptes directement. De la mĂȘme façon, ils ont faussement conclu que lâalliance contractĂ©e par Dieu avec le peuple dâIsraĂ«l les rendait non seulement supĂ©rieurs aux autres, mais que tous les autres peuples devaient ĂȘtre regardĂ©s comme des ennemis. Ils ont oubliĂ© que si le roi David17 considĂ©rait effectivement les ennemis de Dieu comme ses propres ennemis et leur vouait une haine extrĂȘme, dans le mĂȘme temps il demandait Ă Dieu de lâĂ©clairer et de lui faire connaĂźtre sâil suivait, ce faisant, le chemin du mal ». En rĂ©alitĂ©, en plusieurs endroits de lâAncien Testament, il est demandĂ© de ne pas se laisser conduire par la haine18. De façon trĂšs concrĂšte, le livre de lâExode donne cette loi Si tu rencontres le bĆuf de ton ennemi ou son Ăąne Ă©garĂ©, tu ne manqueras pas de les lui ramener. Lorsque tu verras lâĂąne de celui qui te dĂ©teste succomber sous sa charge, et que tu nâauras pas envie dâaider cet homme, aide-le quand mĂȘme Ă dĂ©lester son Ăąne. »19 Et Salomon, dans le livre des Proverbes20, prĂ©conise de donner Ă manger Ă son ennemi sâil a faim et Ă boire sâil a soif ». Ce sera, ajoute-t-il, comme si tu lui mettais des charbons ardents sur sa tĂȘte, et lâĂternel te le rendra »21. JĂ©sus part donc de ce qui semble communĂ©ment admis, vĂ©cu et enseignĂ© en son temps. Il ne rentre pas dans la polĂ©mique, bien quâil y ait matiĂšre, mais ramĂšne les choses au niveau de la relation interpersonnelle. Câest la raison pour laquelle il passe trĂšs vite du vous au tu. Tout commence lĂ dâautant quâĂ bien y regarder la quasi-totalitĂ© des gens nâont guĂšre dâautres possibilitĂ©s dâintervention ou de zone dâinfluence. Pourtant, vous lâaurez remarquĂ©, au cafĂ© du commerce, dans les salons ou autour des tables familiales, voire dans les Ăglises, il y a souvent une foule dâexperts pour rĂ©soudre les crises internationales, mais ces mĂȘmes experts se rĂ©vĂšlent la plupart du temps incapables de gĂ©rer de bonnes relations dans leur couple, leur travail ou leur voisinage. Quelle est donc lâintention de JĂ©sus ? JĂ©sus me semble vouloir agir sur plusieurs plans. 1 JĂ©sus veut interrompre le cycle infernal et mortifĂšre de la haine. La haine de lâautre est destructrice, elle me transforme, elle me durcit, me renferme, mâisole et finalement me dĂ©truit. Celui qui se venge pense rĂ©sister et combattre le mal en fait, il a capitulĂ© devant lui. 2 JĂ©sus veut donner Ă celui qui a toutes les raisons de se considĂ©rer comme une victime22 la possibilitĂ© justement de ne pas sâenfermer dans cette position, ajoutant au mal commis un autre mal. Lâennemi me fige dans une position qui me bloque et ultimement mâempĂȘche de vivre. Il me noie dans lâamertume et le ressentiment. 3 JĂ©sus entend bien que nous comprenions quelle est notre place et la responsabilitĂ© qui en dĂ©coule. Enfant de Dieu, nous avons Ă nous comporter comme tels et ĂȘtre misĂ©ricordieux comme lui il lâest, lui qui fait luire son soleil ou tomber la pluie sans discrimination, aussi bien sur les bons que sur les mĂ©chants »23. JĂ©sus attend de nous que nous nous dĂ©marquions. Notre attitude doit ĂȘtre remarquable, elle doit trancher avec lâair du temps, avec ce que lâon appelle aujourdâhui le politiquement correct pour reflĂ©ter, incarner, traduire lâamour du PĂšre, les valeurs de lâĂvangile, la grĂące de Dieu qui ne nous traite pas comme nous le mĂ©ritons, qui ne veut pas la mort du pĂ©cheur mais quâil se repente et quâil vive. 4 JĂ©sus veut que notre ennemi soit confrontĂ© Ă lâamour, quâil ait la possibilitĂ©, au moins une fois, de voir quâil y a une autre loi que celle de la haine et de la vengeance. Câest ainsi que sa conscience pourra, peut-ĂȘtre, ĂȘtre touchĂ©e, que ses certitudes seront Ă©branlĂ©es et quâil dĂ©couvrira ainsi quâon peut vaincre le mal par le bien. Câest cela mettre des charbons ardents sur sa tĂȘte »24. Alors que faire ? Dans les versets qui prĂ©cĂšdent notre texte, JĂ©sus a montrĂ© comment sortir de cette position en nous invitant Ă tendre lâautre joue si quelquâun nous frappe sur la joue droite25. Ce passage fait rĂ©fĂ©rence Ă une pratique bien connue de la culture palestinienne une gifle infligĂ©e avec le revers de la main, par le maĂźtre Ă son esclave. Câest un geste de mĂ©pris, dâhumiliation, un geste qui rabaisse. Si la phrase citĂ©e invite certes Ă renoncer Ă la riposte, elle nâinvite pas pour autant Ă la lĂąchetĂ©, Ă baisser la tĂȘte. Tendre lâautre joue, câest au contraire se redresser et obliger lâautre Ă se remettre en cause. Certes, cela peut conduire lâautre Ă faire un geste dâune violence plus manifeste, car sur lâautre joue ce nâest plus avec le revers de la main quâil devra frapper, câest avec la paume. Par ce contact avec la paume de la main, un bon juif » se rend impur ! Tendre lâautre joue oblige donc le maĂźtre Ă endosser la responsabilitĂ© et les consĂ©quences de son geste. Cela le pousse dans ses retranchements. Cela revient Ă revendiquer dâĂȘtre traitĂ© comme son Ă©gal. Cette attitude peut arrĂȘter la violence parce quâelle interpelle profondĂ©ment la conscience. Ainsi, se redresser va aider lâautre Ă prendre conscience de sa violence et peut-ĂȘtre Ă y renoncer. Le chemin tracĂ© Ătant ainsi debout, ayant relevĂ© la tĂȘte, nous pouvons entendre ce que JĂ©sus nous demande. Il trace le chemin avec quatre verbes aimer, bĂ©nir, faire du bien, prier. On pourrait bien sĂ»r disserter longuement sur chacun dâentre eux, mais je vous propose juste de souligner quelques points. 1 Tout cela est trĂšs concret et demande de notre part une vĂ©ritable implication. Elle est basĂ©e sur un renoncement, le renoncement Ă se venger, le renoncement Ă se battre comme notre adversaire, Ă utiliser les mĂȘmes armes, le renoncement Ă paraĂźtre le plus fort, le renoncement Ă hurler avec les loups et la volontĂ©, autant que cela dĂ©pende de nous, de maintenir la relation. 2 Cette implication est aussi un acte volontaire dâobĂ©issance qui signifie notre dĂ©pendance du PĂšre. Nous croyons que ce quâil nous demande est bon, pour nous, pour lâautre et câest pour cela que nous le faisons. Câest aussi la volontĂ© de ne pas ĂȘtre vaincu par le mal, mais dâen ĂȘtre vainqueur en faisant le bien. 3 Cela traduit chez nous un vĂ©ritable changement de mentalitĂ©. Nous sommes dâaccord de considĂ©rer lâautre, celui qui nous a fait du mal, avec le regard de Dieu. Dieu ne tient pas le coupable pour innocent »26 et il ne sâagit pas de fermer les yeux. Il sâagit dâavoir un regard positif, plein dâespĂ©rance. Il sâagit de se souvenir que nous sommes faits de la mĂȘme pĂąte, que nous sommes crĂ©atures de Dieu au mĂȘme titre, pas plus ni moins aimĂ©s. Il sâagit de se souvenir que câest Ă Dieu de prononcer la sanction, quâil ne nous traite pas comme nous le mĂ©ritons27 et quâil use de patience envers lâhomme, voulant que le maximum de personnes accĂšde au salut28. Nous, Ă qui Dieu a fait grĂące, nous devons faire preuve de la mĂȘme grĂące, de la mĂȘme misĂ©ricorde. Aimer Quel que soit lâhomme, il faut lâaimer si nous aimons Dieu. »29 Câest ce quâĂ©crit le rĂ©formateur Jean Calvin. Cela va se traduire par un regard lucide â car aimer, contrairement Ă ce que lâon croit, ce nâest pas ĂȘtre aveugle, ce nâest pas tout accepter, ce nâest pas se taire. Lâamour prĂ©suppose la possibilitĂ© du reproche et câest dâailleurs lâantidote Ă la haine pouvoir dire Ă lâautre ce quâon a sur le cĆur est libĂ©rateur. BĂ©nir Câest tout simplement dire du bien de lâautre. Ne pas lâenfermer dans sa position dâennemi, ne pas penser quâil ne peut pas changer. Il y a du bon chez lui comme il y a sans doute de profondes blessures. Et le mal avant dâĂȘtre fait est trĂšs souvent, pour ne pas dire toujours, un mal subi. Câest, plus encore, vouloir du bien pour lui. Dans la Bible, la bĂ©nĂ©diction Ă©voque lâimage dâune saine prospĂ©ritĂ© mais aussi la bienveillance envers les malheureux. Câest cette abondance et cette aisance que lâon souhaite Ă lâautre quand on le salue, quand on lui dit Shalom30. Faire du bien Câest-Ă -dire traiter lâautre comme nous voudrions quâil nous traite, se comporter avec lui comme nous aimerions quâon le fasse avec nous31. VoilĂ le cap que nous devons suivre, la rĂšgle Ă appliquer. Le monde ne serait-il pas diffĂ©rent et meilleur si, dĂ©jĂ , nous les chrĂ©tiens, nous appliquions Ă toutes nos actions ce principe ? Prier Câest-Ă -dire se mettre comme Ă nu devant Dieu, lui dire tout le mal que lâon pense de notre ennemi, lui dire notre dĂ©sir de vengeance, notre douleur, notre sentiment de rĂ©volte, dâincomprĂ©hension, lui dire notre incapacitĂ© viscĂ©rale Ă obĂ©ir Ă sa parole, notre impossibilitĂ© dâaimer. Avouer que sâil ne met pas en nous les sentiments qui Ă©taient en JĂ©sus, alors nous sommes de piĂštre chrĂ©tiens. Mais câest aussi parler de notre ennemi Ă Dieu, le remettre entre ses mains, lui demander de sâen occuper et de toucher son cĆur. Et puis, dĂ©poser tout cela devant lui et se souvenir alors que JĂ©sus prie pour nous et quâil veut, par son Esprit, nous conduire sur ce chemin. Ce chemin, il le connaĂźt bien, il lâa dĂ©jĂ fait et il est prĂȘt Ă nous accompagner maintenant. Il en a dĂ©jouĂ© les piĂšges, repĂ©rĂ© les difficultĂ©s et il promet dâĂȘtre avec nous jusquâĂ la fin. Il a vraiment vĂ©cu ce quâil a prĂȘchĂ©, il a vraiment Ă©tĂ© le changement quâil veut voir en nous. Quand ses disciples, Jacques et Jean, veulent commander Ă la foudre de tomber sur des Samaritains qui ont refusĂ© de les accueillir, JĂ©sus leur dit Vous ne savez pas quel esprit vous inspire de telles pensĂ©es ! Le Fils de lâhomme nâest pas venu pour faire mourir les hommes, mais pour les sauver. »32 Alors quâon vient lâarrĂȘter, lâun des disciples prend une Ă©pĂ©e pour dĂ©fendre JĂ©sus et coupe lâoreille du serviteur du grand prĂȘtre, un certain Malchus. JĂ©sus sâinterpose et prononce ces paroles Remets ton Ă©pĂ©e Ă sa place, car tous ceux qui se serviront de lâĂ©pĂ©e mourront par lâĂ©pĂ©e. Penses-tu donc que je ne pourrais pas faire appel Ă mon PĂšre ? Ă lâinstant mĂȘme, il enverrait des dizaines de milliers dâanges Ă mon secours. »33 Alors quâil est devant le grand conseil, on lui crache au visage et on le frappe. Il nous montre alors ce que câest vraiment que tendre lâautre joue refuser de rĂ©pondre Ă la violence par la violence, mais interpeller lâautre, le placer devant sa conscience. Au garde qui vient de le gifler, il dit Si jâai mal parlĂ©, montre-moi oĂč est le mal. Mais si ce que jâai dit est vrai, pourquoi me frappes-tu ? »34 Alors que JĂ©sus est en train dâagoniser sur la croix, il prie pour ses bourreaux et, dans une ultime priĂšre, il demande Ă Dieu de leur pardonner parce quâils ne savent pas ce quâils font35. Câest parce que Dieu a tant aimĂ© le monde â les bons et les mĂ©chants â quâil a envoyĂ© JĂ©sus mourir sur la croix. Câest pour moi, pour vous, pour toi⊠Pour que nous soyons libĂ©rĂ©s des puissances de la mort et de la haine. Il nous a aimĂ©s le premier et a montrĂ© son amour ; alors que nous Ă©tions ses ennemis, Christ est mort pour nous, pour que, aimĂ©s, nous puissions Ă notre tour aimer lâautre. Christ a souffert pour vous, vous laissant un exemple, pour que vous suiviez ses traces. Il nâa commis aucun pĂ©chĂ©, ses lĂšvres nâont jamais prononcĂ© de mensonge. InjuriĂ©, il ne ripostait pas par lâinjure. Quand on le faisait souffrir, il ne formulait aucune menace, mais remettait sa cause entre les mains du juste Juge. Il a pris nos pĂ©chĂ©s sur lui et les a portĂ©s dans son corps, sur la croix, afin quâĂ©tant morts pour le pĂ©chĂ©, nous menions une vie juste. Oui, câest par ses blessures que vous avez Ă©tĂ© guĂ©ris. Car vous Ă©tiez comme des brebis errantes mais, Ă prĂ©sent, vous ĂȘtes retournĂ©s vers le berger qui veille sur vous36. Il a remportĂ© la victoire sur le mal par le bien et, au matin de PĂąques, dans la blanche lueur dâun jour nouveau, le RessuscitĂ© vient Ă notre rencontre et nous dit Nâayez pas peur, faites-moi confiance, jâai vaincu le monde, je suis avec vous tous les jours. Rien ne peut vous sĂ©parer de mon amour, alors avancez sans crainte Ă ma suite Ne rendez pas le mal pour le mal, ni lâinjure pour lâinjure. RĂ©pondez au contraire par la bĂ©nĂ©diction, car câest Ă cela que vous avez Ă©tĂ© appelĂ©s, afin de recevoir vous-mĂȘmes la bĂ©nĂ©diction [âŠ] Fuyez ce qui est mal et faites le bien, recherchez la paix avec tĂ©nacitĂ©37. StĂ©phane Lauzet est chargĂ© des relations avec la francophonie pour lâAlliance Ă©vangĂ©lique mondiale.â©ïž Voir Michel Johner, LâĂ©thique du Sermon sur la montagne », La Revue rĂ©formĂ©e 225 2003/5, p. 111 Pour le croyant, une glorieuse promesse ! [âŠ] la nature et lâĂ©tendue de la libertĂ© Ă laquelle le Seigneur veut Ă©lever ses enfants, au travers de sa grĂące et de lâĆuvre progressive de sanctification et de rĂ©gĂ©nĂ©ration quâil entreprend dans leur vie. »â©ïž Matthieu Mais lâidĂ©e de prier pour ses persĂ©cuteurs est prĂ©sente dans le judaĂŻsme rabbinique, comme en tĂ©moigne ce midrach Berakhot 10a Il y avait des gens vils dans le voisinage de Rabbi MĂ©ir qui lui causaient grand tort. Rabbi MĂ©ir voulut implorer la pitiĂ© divine, pour que Dieu les fasse pĂ©rir. Brouria, sa femme, Ă qui il fit part de ses intentions, lui dit As-tu seulement compris le sens du verset âčQue les pĂ©chĂ©s disparaissent de la terre !âș ? Ps Est-il demandĂ© que les âčpĂ©cheursâș disparaissent ou que les âčpĂ©chĂ©sâș disparaissent ? Les pĂ©chĂ©s ! Observe Ă prĂ©sent la suite du verset, que dit-il ? â âčet de mĂ©chants, il nây en a plus.âș En effet, puisquâil nây aura plus de pĂ©chĂ©, il nây aura plus non plus de pĂ©cheur ! Invoque plutĂŽt la pitiĂ© divine pour que ces hommes se repentent devant Dieu, et alors, de mĂ©chants, il nây en aura plus ! Rabbi MĂ©ir implora la pitiĂ© divine pour que ces hommes sâamendent de leurs mĂ©faits et ils revinrent Ă Dieu. » Krygier Rivon, Tu aimeras ton ennemi⊠», PardĂšs 1/2004 n° 36, p. 247-257 Matthieu 27, 31, 33, 38, 43.â©ïž Si lâon consulte lâindex du recueil Arc-en-ciel, il indique cinq chants sous la rubrique Amour du prochain », mais pas un seul oĂč il soit question dâaimer ses ennemis. DâaprĂšs Luc Oleknovitch Freud, Malaise dans la civilisation, PUF, 1971, p. 61ss.â©ïž Lire sur ce sujet, entre autres, Paul Valadier, Nietzsche et la critique du christianisme, cogitatio fidei 77, Cerf 1974.â©ïž Romains Ne vous prenez pas pour des sages. » Voir aussi Proverbes Romains Câest Ă moi quâil appartient de faire justice, câest moi qui rendrai Ă chacun selon son dĂ». » Voir aussi Proverbes Romains Romains Martin Luther King, La force dâaimer, p. 71ss, Casterman, 1964.â©ïž Voir fin du chapitre Il ne suffit pas de dire Seigneur. Il faut accomplir la volontĂ© de mon PĂšre cĂ©leste. [âŠ] Celui qui Ă©coute et met en pratique ma parole ressemble Ă un homme sensĂ© qui a bĂątit sa maison sur le roc. »â©ïž 1 TimothĂ©e Matthieu Psaume LĂ©vitique Exode 5.â©ïž Proverbes 22. Voir aussi qui interdit de rendre le mal et invite Ă espĂ©rer en Dieu, et AndrĂ© LeliĂšvre, La sagesse des proverbes, Labor et Fides, 1993, p. 97. Pour beaucoup dâinterprĂštes, ces braises sont une image de la confusion, de la honte et du repentir du mĂ©chant devant la bontĂ© que sa victime lui manifeste. »â©ïž Voici ce que dit Charles Rojzman Ă ce sujet La position de victime est une impasse. DĂ©signer un coupable donne le sentiment dâavoir trouvĂ© lâorigine du problĂšme. En rĂ©alitĂ©, câest une voie qui condamne Ă lâimpuissance, car on ne peut pas changer lâautre. La violence devient alors le moyen dâagir malgrĂ© tout, en sâattaquant Ă un bouc Ă©missaire. Tout ce que lâon obtient, câest un cercle vicieux de rancĆurs et de reprĂ©sailles. » consultĂ© le 14 dĂ©cembre 2016.â©ïž Matthieu Romains Proverbes Samuel BĂ©nĂ©treau, dans son Commentaire sur lâĂ©pĂźtre aux Romains, Edifac, 1997, p. 163ss, mentionne cette interprĂ©tation, mais privilĂ©gie celle qui voit lĂ lâannonce du jugement Ă venir sur le mĂ©chant.â©ïž Matthieu Voir lâinterprĂ©tation de J. JĂ©rĂ©mias, in France, LâĂvangile selon Matthieu, Farel/Sator, 1987, p. 112.â©ïž Exode Psaume Il ne nous traite pas selon le mal que nous avons commis, il ne nous punit pas comme le mĂ©ritent nos fautes. »â©ïž Romains ; 2 Pierre Jean Calvin, Institution de la religion chrĂ©tienne, Kerygma/Excelsis, 2009, II, viii, 54, p. 355 Nous devons avoir de tels sentiments vis-Ă -vis de tous les hommes, sans en excepter un seul, sans distinguer entre le Grec et le Barbare, sans regarder sâils en sont dignes ou non, sâils sont amis ou ennemis. [âŠ] Câest pourquoi si nous voulons cheminer sur la voie droite de lâamour, nous ne devons pas considĂ©rer les hommes, car cela nous contraindrait souvent Ă les haĂŻr plus quâĂ les aimer. Il nous faut plutĂŽt regarder Ă Dieu, qui nous commande dâĂ©tendre Ă tous les hommes lâamour que nous lui portons. Quel que soit lâhomme, il faut lâaimer si nous aimons Dieu. »â©ïž Vocabulaire de thĂ©ologie biblique, Xavier LĂ©on Dufour sous dir., Cerf, Paris, 1974, article BĂ©nĂ©diction » p. 120 et article Paix » p. 879.â©ïž Matthieu Faites pour les autres tout ce que vous voudriez quâils fassent pour vous, car câest lĂ tout lâenseignement de la Loi et des prophĂštes. » Ce verset est souvent nommĂ© la rĂšgle dâor » et constitue le fondement de ce que lâon appelle lâĂ©thique de la rĂ©ciprocitĂ©.â©ïž Luc Matthieu Jean Luc 1 Pierre 1 Pierre
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đŒ (@nails_and_places) on Instagram: â"Aimer c'est du dĂ©sordre alors aimons !" ïžđâ
Il est tout Ă fait naturel de vouloir que les autres voient uniquement nos qualitĂ©s. Ainsi, nous sommes souvent appelĂ©s Ă faire de notre mieux, en prenant bien soin de mettre lâaccent sur nos rĂ©alisations et nos traits de caractĂšre valorisants. Alors, pourquoi rĂ©ussissons-nous tout de mĂȘme Ă ĂȘtre agaçants ? En fait, la rĂ©ponse est que malgrĂ© toutes nos inclinations et pratiques naturelles, une grande partie de notre autoreprĂ©sentation finit par se retourner contre nous. Dans cet article, dĂ©couvrez ce qui vous rend si agaçant, selon votre signe du qui rend agaçant chaque signe du zodiaqueBrenĂ© Brown, chercheuse en science humaines et sociales Ă lâUniversitĂ© de Houston a dĂ©clarĂ© Les imperfections ne sont pas des dĂ©fauts, elles nous rappellent simplement que nous sommes tous dans le mĂȘme bateau. ». Pourtant, nombreux sont ceux qui ont du mal Ă ĂȘtre honnĂȘtes avec eux-mĂȘmes et avec les autres parce quâils associent leurs dĂ©fauts et/ou leurs erreurs Ă la culpabilitĂ© et Ă la honte. En rĂ©alitĂ©, le plus important est dâen ĂȘtre conscient mais sachez que ce que vous considĂ©rez comme des limites ne sont autre que de la bonne fortune dĂ©guisĂ©e en qui rend agaçant chaque signe du zodiaque1 BĂ©lierMeneur naturel, vous avez tendance Ă imposer vos choix et vos idĂ©es que cela plaise ou non. Ainsi, vous avez horreur dâĂȘtre contredit et nâhĂ©sitez pas Ă dĂ©clarer la guerre Ă quiconque ose se mettre en travers de votre chemin. Signe de feu, vous ĂȘtes naturellement fougueux, capricieux, Ă©gocentrique et sans scrupule. Vous vous comportez comme si vous Ă©tiez le centre du monde et cela a tendance Ă agacer toutes les personnes qui vous TaureauVous ĂȘtes ce quâon appelle une tĂȘte de mule ! Vos croyances et vos idĂ©es sur le monde sont extrĂȘmement arrĂȘtĂ©eset personne ne pourra vous faire changer dâavis. En plus dâĂȘtre complĂ©tement bornĂ©s, vous vous obstinez Ă imposer vos idĂ©es aux autres ce qui peut les mettre trĂšs mal Ă lâ GĂ©meaux VĂ©ritables pipelettes, vous nâarrĂȘtez pas de bavasser, encore et encore ! Vous ĂȘtes effectivement particuliĂšrement sociable, mais un peu trop bavards. En outre, vous nâarrĂȘtez pas de rĂ©pĂ©ter la mĂȘme histoire ce qui peut ĂȘtre Ă©puisant voire usant pour les gens qui vous CancerVous ĂȘtes beaucoup trop sensibles et Ă©motifs. Les gens doivent constamment vous prendre avec des pincettes pour Ă©viter une crise de larmes ce qui est Ă©puisant Ă la longue. Lorsque quelque chose ne vous convient pas, vous faites une scĂšne afin de vous assurer que tout le monde le LionEgocentriques et narcissiques, vous passez votre temps Ă chanter vos propres louanges. Vous avez besoin dâĂȘtre le centre de lâattention et apprĂ©ciez tenir le premier rĂŽle. Sachez que cette confiance exacerbĂ©e fait fuir les gens et quâils ont tendance Ă croire que vous ĂȘtes Ă©goĂŻstes, arrogants et imbus de votre ViergeExigeants de nature, vous ĂȘtes particuliĂšrement difficiles Ă satisfaire. Votre cĂŽtĂ© perfectionniste vous rend Ă©nervants aux yeux de tous car vous avez la critique facile et passez votre temps Ă souligner les dĂ©fauts des BalanceVous ĂȘtes indĂ©cis et dĂ©pendants Ă©motionnellement. Vous ĂȘtes la personne qui se dĂ©fait de tous ses amis dĂšs quâelle se met en couple et a tendance Ă compter sur son partenaire pour ĂȘtre heureuse. Câest trĂšs frustrant pour les gens qui vous entourent de vous voir nĂ©gliger votre personne et ce que vous ĂȘtes en tant quâindividu simplement par peur de vous retrouver ScorpionBeaucoup trop intenses et passionnĂ©s, cela vous pousse Ă ĂȘtre manipulateurs, hostiles et assoiffĂ©s de vengeance. DĂšs que vous nâobtenez pas ce que vous voulez, cette frustration se transforme en colĂšre et vous nâhĂ©sitez pas Ă user de tous les moyens pour arriver Ă vos SagittaireVous nâarrivez pas Ă tenir en place et cette Ă©nergie dĂ©bordante finit par Ă©puiser les autres. Aventureux, cela se traduit malheureusement par un manque de stabilitĂ© et de cohĂ©rence dans la vie. Le dĂ©sordre alĂ©atoire dans lequel vous vivez a tendance Ă irriter les personnes qui vous ne vous arrĂȘte. Vous ĂȘtes totalement orientĂ©s vers vos objectifs mais cela peut donner de vous lâimage dâune personne froide et arrogante. Vous pensez toujours avoir rĂ©ponse Ă tout mais nâoubliez pas que vous aussi, vous pouvez vous ĂȘtes tellement stoĂŻques que parfois, les gens ont lâimpression de parler Ă un robot. FermĂ©s et distants, vous ne laissez en aucun cas paraitre vos Ă©motions. Cela vous permet de vous protĂ©ger mais les gens ont tendance Ă penser que vous ĂȘtes ĂȘtes un dĂ©sordre ambulant. Vous ĂȘtes incapable de gĂ©rer vos sentiments et vos relations avec les autres et certaines personnes ont en marre de devoir passer derriĂšre vous pour arranger vos bĂȘtises. Lire aussi Câest le signe du zodiaque le plus faux de tous faites attention quand il vous parle
Lecoup du « j'ai pas aimé Baldur's Gate parce qu'il y 80% de combats », c'est un peu n'importe quoi, Baldur's Gate 1 et 2 ont tellement de dialogues que ce sont presque des bouquins (on est
- En revanche, j'espĂšre qu'on devient plus... profond? - Je n'ai pas cette impression. D'ailleurs, - profond?... J'ai grand'peur qu'il n'y ait de grandes illusions dans les tentatives que nous faisons pour nous creuser... Les uns croient pĂ©nĂ©trer dans les couches primaires de leur existence... Ils y cherchent gĂ©nĂ©ralement des fossiles obscĂšnes. - Ils ne les chercheraient pas s'ils ne les avaient pas dĂ©jĂ trouvĂ©s. - Bien entendu. Les autres imaginent qu'ils approchent ainsi de... ce qu'ils sont, au prix d'une contention et d'une sorte de... nĂ©gation extĂ©rieure trĂšs pĂ©nible... Ils ne voient pas qu'ils ne font que s'infliger une dĂ©formation particuliĂšre... Ils essaient d'accommoder la sensibilitĂ© de leur conscience Ă je ne sais quelle vision retournĂ©e, Ă des choses en deçà ... En somme, il y a peut-ĂȘtre des profondeurs accessibles, mais ce que l'on y trouve ne vaut guĂšre la peine d'y descendre, et des profondeurs insondables... Si mĂȘme on y pouvait se risquer et y apercevoir quelque chose, on ne comprendrait rien Ă ce qu'on y trouverait. - Quant Ă moi, je suis simpliste. Si je m'observe, je trouve... qu'il y a des choses que l'on peut dire aux autres ; et d'autres, qu'on ne peut dire qu'Ă soi-mĂȘme... et d'autres, qu'on ne peut mĂȘme pas se dire Ă soi-mĂȘme. Il y a quelques saletĂ©s, Ă©videntes, - et d'ailleurs universelles... Cela n'a donc pas un immense intĂ©rĂȘt. Et il y a encore des choses.., qui semblent puissantes, indistinctes... -Tout Ă fait d'accord. Des choses qui ne ressemblent rien... J'entrevois ici la vie des viscĂšres... - Halte. DĂ©fense d'entrer. Danger de mort... Restons Ă la surface... A propos de surface, est-il exact que vous ayez dit ou Ă©crit ceci Ce qu'il y a de plus profond dans l'homme, c'est la peau ? - C'est vrai. - Qu'entendiez-vous par lĂ ? - C'est simplicissime... Un jour, agacĂ© que j'Ă©tais par ces mots de profond et de profondeur... - Que nous venons d'employer Ă notre aise... Ecoutez je constate que vous manifestez une sensibilitĂ© exagĂ©rĂ©e Ă l'endroit des mots. Vous vous cabrez Ă chaque instant. Ce sont des expĂ©dients, que diable !...La vie n'a pas le temps d'attendre la rigueur. On se dĂ©brouille. NapolĂ©on disait qu'Ă la guerre, on s'engage de partout, et puis l'on voit... - Oh ! sur la guerre, il en a dit de toutes les couleurs... D'ailleurs, tous ceux qui ont pratiquĂ© quelque chose, quand ils veulent exprimer ou transmettre leur expĂ©rience... RĂšgle gĂ©nĂ©rale, ils Ă©mettent les prĂ©ceptes les plus contradictoires... Vous en trouverez jusque dans l'Evangi1e... - J'avoue qu'en mĂ©decine mĂȘme... - MĂȘme dans Hippocrate... Essayez de combiner Principiis obsta, avec Quieta non movere... - On fait ce qu'on peut. Mais j'en reviens Ă vous. Vous butez Ă chaque mot... On ne peut pas parler tranquillement avec vous. On verse Ă chaque instant. Vous arrivez Ă ne plus pouvoir causer avec vous-mĂȘme. Comment diable pouvez-vous parvenir Ă former la moindre pensĂ©e, dans ces conditions? Je me le demande! - Mon cher docteur, j'aime mieux n'arriver Ă rien consciemment, que de n'arriver Ă rien... sans m'en douter... Donc, j'Ă©tais agacĂ©. Profond et profondeur m'exaspĂ©raient. - Je parie que vous aviez lu quelque article sur Pascal. - Je ne tiens pas ce pari. Pas plus que celui de Pascal... - Et alors ? - Alors ?... Il m'est souvenu de ce qu'on trouve dans les livres de mĂ©decine au sujet du dĂ©veloppement de l'embryon. Un beau jour, il se fait un repli, un sillon dans l'enveloppe externe... - L'ectoderme. Et cela se ferme... - HĂ©las !... Tout notre malheur vient de lĂ ... Chorda dorsalis ! Et puis, moelle, cerveau, tout ce qu'il faut pour sentir, pĂątir, penser..., ĂȘtre profond Tout vient de lĂ ... - Et alors ? - Eh bien, ce sont des inventions de la peau !... Nous avons beau creuser, docteur, nous sommes... ectoderme. - Oui, mais... il y a des prolongements. - Nous poussons jusque dans les viscĂšres... Mais, de ce cĂŽtĂ©, nous n'avons pas d'appareils trĂšs perfectionnĂ©s. Rien qui ressemble aux combinaisons de mĂ©canismes, Ă l'Ă©talement de sensations qui se trouvent dans l'oreille et dans l'oeil. Tout est grossier. Brutal. Cela ne sait guĂšre dire que Bon, ou mauvais. - GĂ©nĂ©ralement mauvais. - Mais rien de plus puissant, n'est-ce pas ?... Il y a lĂ quelques gros tyrans qui agissent sans s'expliquer... La vie serait supportable sans les viscĂšres - Vous voulez me rĂ©duire Ă la mendicitĂ©! - Bref, la poussĂ©e de la sensibilitĂ© est fort inĂ©gale, ses moyens bien diffĂ©rents selon qu'elle s'Ă©panouit vers... l'extĂ©rieur, ou qu'elle plonge dans les masses... - Laborieuses ! Je suis sĂ»r que vous digĂ©rez capricieusement, et que nous avons le foie un peu gros... - Je n'en doute pas. Et c'est pourquoi je complĂšte na formule Ce qu'il y a de plus profond dans l'homme, c'est la peau, - en tant qu'il se connaĂźt. Mais ce qu'il y a de... vraiment profond dans l'homme, en tant qu'il s'ignore... c'est le foie... Et choses semblables... Vagues ou... sympathiques » ValĂ©ry. L'IdĂ©e fixe. La plĂ©iade, Ćuvres II, p. 215,216. Corps ? La grande Ă©nigme d'oĂč Ă©merge le pouvoir rĂ©flĂ©chissant d'une fonction par laquelle advient un Soi. Un nĂ©ant de sens, un chaos, un empĂątement de ce qui cherche Ă se libĂ©rer de la nuit pour inventer le poĂšme du jour, toujours Ă réécrire contre les forces de dissolution de la vie obscure, mouvante, indistincte, prisonniĂšre du silence de ce qui n'a pas de nom. CaractĂšre insondable de ce qui est en deçà du langage ! Dire ou l'effort de donner forme Ă l'informe, de mettre un peu d'ordre dans le dĂ©sordre, de porter Ă l'expression, la pensĂ©e entrevoyant furtivement la clartĂ© qui la hante. Il n'y a pas d'autre identitĂ© que celle qui se conquiert sur un fond obscur se dĂ©ployant sans profondeur comme jeu de forces anonymes et aveugles. Alors malheur Ă celui qui n'a pas Ă©tĂ© armĂ© pour cette conquĂȘte ! Le corps pĂąteux, le corps morcelĂ©, pulvĂ©risĂ©, le corps aĂ©rien parfois est l'expĂ©rience commune. L'aventure humaine commence au-delĂ avec la possibilitĂ© de dire Je, c'est-Ă -dire avec le passage de la muette cĂ©nesthĂ©sie Ă l'expression linguistique ou artistique. D'oĂč ce paradoxe que formule ce texte de ValĂ©ry Ce qu'il y a de plus profond en l'homme en tant qu'il est conscient de lui, ce n'est pas l'opaque Ă©paisseur organique, le foie, c'est l'ĂȘtre qu'il fait exister Ă la surface du vide d'oĂč il Ă©merge et qu'il met momentanĂ©ment en Ă©chec. Chacun est pour lui-mĂȘme son propre poĂšme ou selon l'Ă©tymologie grecque sa propre crĂ©ation. Un poĂšme toujours Ă recommencer, un poĂšme toujours menacĂ© par le nĂ©ant sur lequel il s'arrache et qui attend implacablement d'achever son Ćuvre corrosive. J'aime les auteurs qui ne racontent pas des histoires et ne masquent pas le tragique de l'existence humaine. ValĂ©ry est de ceux-lĂ . Oserais-je dire que David Le Breton devrait se mettre Ă son Ă©cole? Cela nous Ă©viterait bien des platitudes psychologisantes sur les blessures de soi », sous-titre de son livre La Peau et la Trace, que je voulais prĂ©senter pour enrichir la culture de mes Ă©lĂšves, mais dont j'avoue qu'il me tombe des mains. Comme s'il Ă©tait possible de porter au langage ou Ă la forme Ă un autre niveau que le langage ou la forme, la difficultĂ© d'ĂȘtre et le fragile sentiment de son identitĂ© ! Alors pourquoi ne pas tirer les leçons de ce qui est, Ă la fois, avouĂ© page 35 du livre et dĂ©niĂ© par tout un bavardage insipide, Ă savoir que le recours au corps marque la dĂ©faillance de la parole et de la pensĂ©e, la dĂ©robade du sens » ? Les mutilations du corps, la souffrance expĂ©rimentĂ©e comme maniĂšre de se sentir exister ne sont pas des poĂšmes c'est encore la sinistre geste de ce qui est en deçà du poĂšme. Le malheur d'exister, le flottement du sentiment d'identitĂ© sont la vĂ©ritĂ© universelle de l'humaine condition, mais il y a ceux qui ont Ă©tĂ© armĂ©s pour une conquĂȘte par la pensĂ©e et la parole d'eux-mĂȘmes et de leur monde et les laissĂ©s pour compte, les victimes des infralangues, ceux que l'Ă©cole de la RĂ©publique a l'air de produire Ă la pelle si l'on en croit ce dĂ©testable film Entre les murs ». On ne saurait trop se pĂ©nĂ©trer de ce que ValĂ©ry affirme ici. Une psychologie des profondeurs devient vite creuse. J'avoue ĂȘtre, comme lui, exaspĂ©rĂ©e par ces mots de profond et de profondeur. Et ce n'est pas rien de se sentir cautionnĂ©e par un esprit de cette trempe. Le moi profond, le sujet un et identique Ă soi, sont les effets incertains du texte d'une existence qui s'Ă©crit avec courage et luciditĂ©, ils n'en sont pas les auteurs donnĂ©s antĂ©rieurement Ă cet effort. Est-ce dĂ©jĂ ce que l'embryologie prĂ©figure lorsqu'elle nous apprend que la peau apparaĂźt dans le dĂ©veloppement embryonnaire avant les autres systĂšmes sensoriels, rĂ©pondant Ă cette loi biologique selon laquelle plus une fonction est prĂ©coce, plus elle a des chances d'ĂȘtre fondamentale. Au stade de la gastrula, l'embryon prend la forme d'un sac par invagination d'un des pĂŽles et prĂ©sente deux feuillets, l'ectoderme et l'endoderme. Cet ectoderme forme Ă la fois la peau incluant les organes des sens et le cerveau. En outre les diffĂ©rents Ă©lĂ©ments qui la constituent ont une reprĂ©sentation importante dans le cerveau, comme le rĂ©vĂšlent les homonculi sensoriels et moteurs qui montrent la reprĂ©sentation proportionnelle des fonctions tactiles dans le cortex, par l'importance de la main et des lĂšvres » Article La Peau, Evelyne Sechaud, dans le Dictionnaire du corps. S'il en est ainsi, il faut donc dire que ce qu'il y a de plus profond en l'homme c'est la peau ». Le plus fondamental est ce qui affleure Ă la surface non par quelques mĂ©canismes qui s'opĂ©reraient en nous sans nous mais par l'action d'une rĂ©ceptivitĂ© ne parvenant Ă la conscience d'elle-mĂȘme que par l'effort lucide de donner sens et de s'approprier par lĂ , ce qui la traverse anonymement. Si j'ai choisi d'illustrer les deux papiers prĂ©cĂ©dents par Lucian Freud et Francis Bacon, c'est prĂ©cisĂ©ment parce que ces grands peintres ne montrent pas autre chose. Pour l'un et pour l'autre, le rĂ©el n'est pas ça, champ de forces, chair muette, mais ce Ă partir de quoi la rĂ©alitĂ© se construit. Il s'agit toujours de capter le mystĂšre de l'apparence dans le mystĂšre de la facture disait Bacon. CitĂ© par Philippe Muray dans "Les cadavres dans le triptyque." Art Press n° 59. Cf. L'obscĂ©nitĂ© dĂ©mocratique. Partager Marqueursapparence, ectoderme, endoderme, foie, infralangue, moi profond, oeuvre d'art, parole, peau, pensĂ©e, profond, surface, viscĂšres
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aimer c est du désordre alors aimons